Electrosmog : Terme populaire qui désigne toute radiation artificielle produite par les radiations électriques et électromagnétiques. Présent partout, l’électrosmog est invisible et inaudible. Depuis l’électrification, alors que de plus en plus de technologies sans fil s’implantent dans les milieux urbains, la communauté scientifique n’arrive à aucune conclusion quant aux effets de la présence grandissante des radiations électromagnétiques.
Géopolitique des radio-fréquences (RF)
Bien qu’immatérielles, les radio-fréquences (RF) doivent être considérées comme un espace, un territoire géopolitique ultra réglementé. Les gouvernements redessinent constamment les frontières de l’allocation RF, alors que l'occupation des espaces électromagnétiques croit au rythme de l'évolution des technologies. En ce sens, le gouvernement canadien a émis en juin 2007 le “Cadre de la politique canadienne du spectre”. Au point 1, on peut y lire : “On devrait laisser jouer le plus possible les forces du marché”.
En plus de l’accès au territoire RF, les gouvernements légifèrent sur les normes de puissance et les modes de transmission. Les technologies récentes et à venir développées par les consortiums de télécoms nous proposent des standards RF basés sur des technologies de plus en plus intrusives et puissantes. Selon les chercheurs du CNRS, en plus des critères techniques, les législateurs doivent tenir compte des aspects sociaux et culturels qu’implique l’utilisation massive de ces nouveaux standards. Mais qui donc traitera de ces enjeux sociaux et culturels, si le principal but visé par les législateurs canadien est de laisser jouer les forces du marché? Comment prendre part au débat public si l’enjeu implique un phénomène abstrait, invisible, qui nécessite des outils extrêmement complexes qui opèrent à l’échelle nanométrique?
Rendre sensible l’electrosmog
Tous les projets de la série Electrosmog utilisent le même logiciel
e_smog_scan. Ce logiciel trace des graphiques de la présence des ondes radioélectriques dans un lieu donné. Utilisant plusieurs antennes, une radio ultra large bande et un ordinateur, ce système enregistre des centaines de milliers de signaux radio, des ULF (Ultra Low Frequency) jusqu’aux micro-ondes. Le logiciel effectue plusieurs tâches : il syntonise une fréquence à tous les 10 millièmes de seconde, enregistre un clip audio, analyse le spectre sonore et calcule la puissance du signal. Ces paramètres sont colligés dans une base de données. Chaque jour, le logiciel enregistre des centaines de milliers de fichiers et génère plus de 8 Go de data.
Les premiers tests du système de captation radio furent faits entre Helsinki et Tallin. En les analysant, il m'a été possible de faire des comparaisons : plus de téléphones cellulaires à Helsinki, moins à Tallin, et plus d'ondes courtes à Tallin qu'à Helsinki. C’est pour cette raison que j’ai voulu multiplier les terrains de captation. Équipé d’antennes, d’une radio, de ma caméra et de disques durs, j’ai fait le
tour du monde en février 2012 et visité les villes de Berlin, Istanbul, Mumbai, Hong-Kong et San-Francisco. J’ai aussi ajouté Montréal,
Venise et
Toronto depuis.
De retour au studio, les données sont analysées et recomposées afin de produire des graphiques, des vidéos et des pièces audio. Alors que
les graphiques montrent la densité des fréquences radio, les vidéo font entendre les milliers de stations radio présentes entre les fréquences 1 Mhz jusqu'à 144MHz. C'est dans cette région du spectre que l'on retrouve les ondes courtes, le AM, le FM, la télé analogue, la police et les ambulances. Pour les images, la densité du ciel des villes visitées est modifiée en fonction de la fluctuation du signal radio. Ces modifications sont faites à l'aide de logiciels qui analysent fréquence par fréquence et ville par ville.
D'autres expériences ont aussi été faites :
les fluctuations des ondes lors du lever du soleil,
l'enregistrement des métadonnées de téléphones cellulaires, ou encore la captation de satellites artificiels.